vivent en zone urbaine en 2020. C’est à dire qu’ils vivent dans une agglomération de plus de 2000 habitants, le seuil de l’urbanité. C’est beaucoup, et cette tendance est mondiale : aujourd’hui, déjà la moitié de l’humanité, soit 4 milliards de personnes, est concernée. Du jamais vu pour la planète qui n’hébergeait qu’un milliard d’urbains en 1960… Construire des zones urbaines durables et résilientes, c’est donc l’enjeu clé des prochaines années !
80 %
des villes de 2050 en France seraient déjà construites aujourd’hui. Alors finalement, plutôt qu’inventer la « ville de demain », est-ce que la priorité ne serait pas plutôt de réaménager les espaces urbanisés déjà existants ?
c’est lorsque de plus en plus de personnes vivent dans les villes et que les villes s’étendent sur plus de terrain au fil du temps. Pour concevoir et aménager ces nouveaux espaces, nous avons progressivement mis au point un ensemble de sciences, arts et techniques : on parle alors d’urbanisme. Voici une (très) très courte histoire de l’urbanisation en France…
Santé et urbanisme, des enjeux qui ont toujours été liés
Peut-on rester en bonne santé en vivant en ville ? En 1987, l’OMS lance un nouveau concept :
l’Urbanisme
Favorable
à la Santé.
Cela regroupe toutes les manières d’aménager les villes pour favoriser la santé et le bien-être des personnes qui y vivent, en s’appuyant sur trois aspects importants du développement durable : l’environnement, le social et l’économie.
Des années plus tard, qu’est-ce que cela veut dire ? Faisons le point.
La ville,
un grand
corps malade ?
Les Français qui vivent dans une commune dont la densité est supérieure à
4 000
hab/km2
sont 56 % à trouver la densité trop importante. Parmi les villes en France atteignant cette densité figurent Lille, Nice, Grenoble, Toulouse, et bien d’autres.
A partir de
8 000
hab/km2
on atteint un seuil de densité critique où les résidents considèrent leur commune comme étant bien trop densément peuplée. Des exemples de villes atteignant cette densité comprennent Lyon ainsi que de nombreuses villes de la région parisienne.
Ce qui fait que des centaines de milliers de personnes sont concernées :
à Paris, par exemple, la densité est de
21 000
hab/km2 !
17 %
des ménages français estimaient souffrir du bruit en 2017.
La pollution sonore s’installe dans notre quotidien urbain : en France en 2020, près de 40 % des habitants des communes de plus de 250 000 habitants sont exposés à un niveau sonore de jour supérieur à 60 décibels en raison du trafic routier, alors que l’OMS préconise un niveau quotidien sonore de 40 db pour une vie en bonne santé.
47 000
décès prématurés sont causés en France chaque année par l’exposition aux particules fines et aux dioxydes d’azote. On estime que la pollution atmosphérique contribue à près de 9 % des décès prématurés.
L’habitat urbain qui nous expose quotidiennement à la circulation routière et aux activités économiques émettrices de carbone est étroitement lié à ce grave problème de santé publique.
Ce n’est pas tout : top 3 des risques de santé liés à la vie en ville…
#1
La sédentarité va-t-elle ruiner notre santé ?
La
sédentarité
désignait à l’origine un style de vie en contraste avec le nomadisme. De nos jours, la sédentarité se réfère à une situation d’éveil caractérisée par une faible dépense énergétique, en position assise ou allongée. En raison de l’urbanisation axée sur l’utilisation de la voiture et de l’essor des emplois dans le secteur tertiaire, les individus adoptent des modes de transport passifs et réduisent leur niveau d’activité physique. La sédentarité est solidement ancrée dans les pays développés et sa progression est observable partout ailleurs dans le monde. Il s’agit d’un enjeu mondial majeur en matière de santé publique
La sédentarité est le
4e
facteur de risque de mortalité au monde selon l’OMS. Cette situation découle d’une diminution des activités extérieures à la fois pour le travail et les loisirs, ainsi que du recours prédominant aux modes de transport motorisés pour la plupart des déplacements. Les individus qui mènent une vie sédentaire présentent un risque accru de développer diverses affections, parmi lesquelles des problèmes musculosquelettiques, l’obésité et le diabète.
x2
En moins de 25 ans, le taux d’adultes obèses a doublé en France. Il atteint aujourd’hui 17 % de la population. C’est un problème multifactoriel de santé publique, fortement lié aux inégalités sociales, mais qu’une transition vers les mobilités actives peut contribuer à atténuer.
Au secours, nous sommes devenus trop sédentaires ! Et si on faisait un tour dehors ?
Ville et nature,
un rendez-vous
manqué ?
C’est la surface d’espaces verts dont bénéficient en moyenne les habitants des 50 plus grandes villes de France en 2020
Pas mal
du tout ?
La France n’est effectivement pas si mal lotie en matière de nature sur son territoire. Mais cette réalité en cache une autre : les espaces verts dans les zones urbaines sont inégalement répartis, souvent majoritairement concentrés en périphérie, et les centres des agglomérations peuvent être de véritables déserts.
D’autres chiffres sont nettement moins réjouissants :
0,2
C’est le nombre d’arbres par habitant en moyenne dans les 50 plus grandes villes de France. C’est trop peu !
En effet, tout le monde ne peut pas compter sur la propriété privé pour accéder à son coin de verdure :
32 %
des Français vivaient en appartement en 2016, et ils étaient peu à bénéficier d’un jardin commun au sein de leur résidence.
Du côté de ceux qui habitent en maison individuelle, tous ne possèdent pas le jardin individuel tant prisé. Au bout du compte, ce sont
37 %
des Français qui n’ont accès à aucun espace vert affilié à leur logement et qui doivent se rendre dans les jardins publics pour voir un brin d’herbe.
Pas facile tous les jours !
De plus, nos habitats se révèlent inadaptés face aux défis futurs…
Les villes, en première ligne face au changement climatique ?
Résilience ?
Selon l’ADEME, la résilience c’est la capacité à :
- Anticiper les perturbations
- Atténuer ses effets
- Se relever grâce à l’apprentissage, l’innovation et l’adaptation
- Evoluer vers un nouvel équilibre
Mais au fait, toutes ces affirmations sont vraies. La confiance des Français dans la capacité de résilience de leur territoire est modérée. Elle varie cependant fortement selon leur emplacement géographique : seuls 30% des franciliens déclarent se sentir confiants face à l’avenir, mais ils sont jusqu’à 44% en Bretagne. Parmi les Français qui pourraient potentiellement déménager pour cette raison, ce n’est un projet sérieusement envisagé que pour 1/7 d’entre eux.
2/3
des bâtiments
ont été construits avant 1974 en France, c’est-à-dire avant l’introduction de réglementations thermiques.
Vous avez dit passoires énergétiques ?
Sans isolation, dur de résister aux périodes de grand froid, à l’humidité ou aux vagues de chaleur. En effet, cette problématique s’accentue en France, dans l’ensemble des villes européennes et partout dans le monde…
Cette problématique de la surchauffe urbaine est accentuée par le phénomène d’îlot de chaleur urbain.
Ilot de Chaleur Urbain ?
L’expression « îlots de chaleur urbains » désigne la différence de température observée entre les milieux urbains et les zones rurales environnantes.
En effet, des observations ont démontré que les températures des centres urbains sont en moyenne supérieures de 4 °C et peuvent atteindre jusqu’à 12 °C de plus que les régions limitrophes
113
jours
ont été concernés par des vagues de chaleur sur le territoire français sur la période 2007-2021, contre seulement 27 sur la période 1947-1960 ! Ces épisodes sont de plus en plus intenses, longs et fréquents. Tout en agissant contre le changement climatique, il y a urgence à adapter nos espaces urbains.
de la clim’
des ménages sont équipés de système de climatisation en 2020, un chiffre qui a quasiment doublé en moins de 10 ans ! Mauvaise nouvelle, la climatisation est aujourd’hui responsable de près de 5 % des émissions d’équivalent CO2 du secteur bâtiment.
ce n’est pas les ménages qu’il faut pointer du doigt en premier : les premiers consommateurs en France restent les centres commerciaux, bureaux et magasins. Puisque griller sur le bitume et se rafraîchir artificiellement font partie du même problème, si l’on prenait au sérieux la nécessiter de rafraîchir nos villes et nos constructions ?
En résumé, les villes sont facteurs d’émissions importantes et en retour souffrent des effets du changement climatique.
Comment sortir du cercle vicieux ?
Pour des villes dans lesquelles il fait bon vivre ?
Un petit tour dans une ville qui nous ferait du bien
Un petit tour dans une ville qui nous ferait du bien
En urbanisme, chaque problème a de multiples solutions.
Tout d’abord, pour lutter contre la sédentarité…
Des espaces qui bougent :
des villes engagées pour la mobilité active
65 %
des Français ont pratiqué le vélo au moins une fois au cours de l’année 2021.
des parts modales de déplacement. C’est bien trop peu !
des parts modales de déplacements quotidiens. De nombreuses aides à l’achat existent :
50 %
des déplacements de moins de 1 km et
74 %
des déplacements de moins de 5 km sont effectués en voiture. Pourtant, c’est prouvé, en ville on va aussi vite en vélo (15 km/h en moyenne) qu’en voiture (14 km/h).
12 minutes
En marchant une demi-heure par jour, on effectue facilement le temps d’exercice quotidien préconisé par l’OMS. À vos baskets !
La mobilité active a donc un potentiel de croissance immense si l’on encourage la marche et le vélo !
Pour une meilleure santé publique, des économies pour tous et des villes décarbonées, c’est finalement la même solution.
Des lieux qui encouragent la mixité sociale et intergénérationnelle : les tiers-lieux
Un tiers-lieu, c’est un lieu entre l’habitation et l’espace de travail, dans lequel les citoyens sont encouragés à se réunir et échanger. On peut les trouver sous de nombreuses formes, comme des ateliers de fabrication numérique, des espaces de coworking, des espaces culturels ou encore des cuisines partagées. On en compte 3 500 en France en 2022. La présence de tels lieux dans un périmètre proche des habitats incite à sortir, se rencontrer, et donc développer sa mobilité. Un vrai plus pour notre santé physique et mentale !
Les tiers-lieux français se situent à 55 % hors des métropoles. Et à 45 % au sein des métropoles. Ces initiatives sont au bénéfice de tous, des plus urbains aux plus ruraux.
Afin que la marche n’exclue pas les personnes plus vulnérables qui ont besoin de faire une pause régulièrement, le mobilier urbain est indispensable. Placer des bancs, des tables et chaises de pique-nique et des fontaines à eau, c’est un véritable pas vers plus d’inclusivité et de lien social.
81 %
des citadins imaginent ainsi se rendre plus souvent en centre-ville si ceux-ci offraient plus d’aménagements extérieurs de convivialité.
Le saviez-vous ?
Être actif ou pas, c’est parfois une question de design…
Selon le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, le design actif consiste à aménager l’espace public afin de rapprocher de l’activité physique et sportive celles et ceux qui en sont le plus éloignés.
Cette démarche permet aux individus de se réapproprier l’espace public; elle favorise l’accessibilité et la diversité d’usages. C’est aussi l’occasion de mettre en valeur le patrimoine existant, d’encourager sobriété des aménagements, ou encore de proposer des projets ludiques…
Une autre bonne raison pour bouger ?
Un cadre agréable. Et se mettre au vert sans partir en vacances, c’est possible…
La nature arrive chez nous !
Des villes en vert et bleu
La capitale de l’Anjou remporte la palme des villes les plus vertes dans la 3e édition du palmarès décerné par l’Observatoire des villes vertes. Un véritable exemple pour les agglomérations cherchant à offrir plus d’espace à la nature. Et pas de secret sous cette performance : la ville investit près de 100€ par an et par habitant aux espaces verts (contre 76€ en moyenne), encourage les initiatives locales et l’innovation pour améliorer son savoir-faire vert et mène une politique « zéro phyto » dans 90% des espaces végétalisés. Des efforts dont les habitants récoltent les fruits au quotidien !
Grâce à la photosynthèse, les végétaux absorbent du dioxyde de carbone (CO2) et produisent de l’oxygène. La végétation a également un rôle de filtre des particules atmosphériques et des polluants. C’est donc un atout indispensable pour la qualité de notre air.
L’évapotranspiration rentre également en jeu : en transpirant, la végétation relâche de l’eau dans l’atmosphère. En s’évaporant, cette eau rafraîchit l’air ambiant.
= 5 tonnes d’équivalent CO2
et jusqu’à 20kg de particules fines retenues par an
Il faut cependant savoir qu’on doit la majorité de cette séquestration du carbone aux arbres : tout espace vert ne se vaut donc pas, et on ne doit pas attendre les mêmes résultats d’une simple pelouse que d’une forêt…
300 m
C’est la distance à laquelle devrait se trouver l’espace vert le plus proche d’un habitat urbain selon les préconisations de l’OMS. Cela correspond à environ 5 minutes de marche. Pour encourager sa fréquentation, on peut également l’agrémenter de mobilier urbain comme des bancs, des aménagements sportifs ou des jeux d’enfants, et de points d’eau réguliers.
Entretenir les espaces verts en faisant pâturer des animaux, c’est une technique millénaire, saine et peu coûteuse que nos communes redécouvrent peu à peu : du vrai gagnant-gagnant !
L’écopastoralisme urbain a de plus en plus de succès depuis que de grandes métropoles comme Lille, Lyon ou Montpellier l’ont adopté dans les années 2000.
Sentiment d’apaisement, réduction de l’anxiété, bien-être, réduction de la pollution de l’air et fraicheur : pour tout ce que font les espaces verts, les espaces aquatiques ne sont pas en reste. Les habitats proches des sources ou plans d’eau sont plus susceptibles d’héberger des personnes en meilleure santé.
Ces deux typologies d’espaces font donc partie d’un même cercle vertueux et se complètent pour une ville plus propice au bien-être.
Et pour mieux construire notre avenir…
Face au changement climatique, il faut s’adapter
Des villes résilientes
À grande échelle ne sera plus qu’un mauvais souvenir en 2050. C’est du moins ce que prescrit la loi Climat et Résilience en 2021, qui vise
0 artificialisation nette de sol à partir de 2050.
D’ici là, elle prévoit de réduire la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers de 50 % au cours des 10 prochaines années.
- Choisir des surfaces claires qui réfléchissent la chaleur
- Désimperméabiliser et revégétaliser
- Multiplier l’accès aux points d’eau pour les habitants
- Autant que possible, éviter l’usage du climatiseur
- Et bien sûr, combiner toutes ces solutions et les adapter au contexte : à chaque cas particulier sa solution !
Ne sont pas seulement un atout pour la santé physique et mentale des habitants, ils sont également nos meilleurs alliés face au changement climatique.
Leurs 3 spécialités :
- ils captent une partie du CO2 rejetée par la ville et nous donnent de l’oxygène en retour
- ils font baisser la température ambiante durant les vagues de chaleur
- ils absorbent l’excès de pluie et diminuent les risques d’inondation
Il est donc important de concevoir des espaces verts résilients, et d’y apporter un soin spécifique pendant les périodes de grand froid, de précipitations, ou de canicule.
La végétalisation de nos territoires doit donc être conçue selon des critères de résilience et de durabilité, en fonction du climat présent et futur et surtout de la disponibilité des ressources en eau.
2 à 10 °C
C’est la différence de température par forte chaleur entre une rue ombragée par les arbres et
une rue sans végétation, intégralement imperméabilisée.
Un seul arbre mature nous rafraichirait autant que 5 climatiseurs allumés au maximum à plein temps ! Comment ça marche ? Les sols ombragés ne reçoivent pas les rayons directs du soleil et
donc évitent de stocker et rejeter de la chaleur dans la rue, phénomène auquel s’allie celui de l’évapotranspiration.
15 %
des dépenses énergétiques de climatisation thermique peuvent être évitées grâce à la présence d’arbres en milieu urbain. De véritables climatiseurs citadins qui luttent contre les îlots de chaleur. Et en choisissant des essences d’arbres à feuilles caduques (qui tombent en hiver), on n’empêche pas les rayons du soleil d’aller réchauffer les façades en hiver. Les arbres sont nos alliés toute l’année !
Pour mieux vivre les épisodes de froid ou de canicule et éviter d’à son tour contribuer au dérèglement climatique, de nombreuses solutions existent !
À petite échelle
-57 %
de consommation
d’électricité
On a vu que les notions de santé, climat, et d’aménagement du territoire sont intimement liées.
L’urbanisme favorable à la santé nous propose de nombreuses pistes d’amélioration pour aménager nos villes de manière plus saine. Plus sobres en énergie et en ressources, moins polluées et plus agréables à vivre, elles s’inscrivent dans un cercle vertueux d’échange avec leurs habitants, leur environnement et le vivant en général.
À grande échelle
94
millions d’€ d’économie
en dépenses de santé liées au traitement de l’asthme et de l’hypertension, c’est possible en intensifiant les efforts de végétalisation.
Partout, les lignes bougent. De plus en plus de citoyens prennent conscience que les enjeux de santé sont intimement liés au territoire qu’ils occupent et à son aménagement.
À mesure que les problèmes de santé publique s’aggravent, nos solutions doivent se faire toujours plus intelligentes, inventives et démocratiques. Et pour lutter contre le réchauffement climatique et préserver la biodiversité, c’est le même combat !
Développer l’urbanisme favorable à la santé est un des grands défis du XXI siècle, et nous avons de nombreuses clés en main pour y arriver !
Globalement, la qualité de l’air s’améliore ces dernières années sur le territoire français : les niveaux de pollution atmosphérique baissent chaque année depuis plus de deux décennies.
Les émissions de monoxyde et de dioxyde d’azote ont baissé de 60 % depuis l’année 2000 grâce aux progrès réalisés dans le domaine du transport routier.
Les émissions de particules fines ont également baissé de plus de la moitié depuis 2000.
en termes de dépassement des seuils de présence de polluants dans l’air ambiant. En effet, les épisodes de pollution persistent et les régions bénéficient inégalement de l’amélioration de la qualité de l’air : les efforts sont donc à intensifier pour pouvoir respirer un air plus sain.
Voilà c’est fini !
Texte : Morgane Larrieu
Illustration : Rafaelle Fillastre
Dernière mise à jour : juillet 2023