Vers une alimentation saine et durable : quelle est l’assiette idéale ?
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Vers une alimentation saine et durable : quelle est l’assiette idéale ?

Texte : Sarah Morinot
Illustrations : Rafaelle Fillastre

Miam, le beau poulet doré, les lasagnes fumantes, la soupe onctueuse, la délicieuse pizza… Manger est une joie pour les papilles, parfois moins pour la planète. Depuis plusieurs années, nous assistons à un début de prise de conscience des impacts négatifs de notre alimentation sur notre santé, mais aussi sur l’environnement. En changeant quelques-unes de nos habitudes, on pourrait pourtant facilement inverser la tendance.

L’objectif :

Une production alimentaire suffisante, bonne pour notre santé, accessible à tous, rémunératrice pour les producteurs et à l’impact le plus limité possible sur l’environnement.

C’est faisable en mettant les bouchées doubles !

L’essor du système alimentaire moderne
… s’accompagne malheureusement de son lot d’impacts négatifs
Le bon côté
Le mauvais côté
X

Héritage de l’après-guerre, notre alimentation porte encore la marque de la transition alimentaire entamée au XXème siècle.

Nos assiettes, synonymes d’abondance et bon marché, voient la part de produits transformés, voire ultra transformés, augmenter.

Pour changer nos menus, il a fallu repenser l’ensemble de la chaîne de production alimentaire, avec un objectif principal : produire rapidement et en grande quantité.

Une politique qui a fait de la France le premier producteur agricole d’Europe !

Seulement, aujourd’hui, notre système alimentaire atteint ses limites et les conséquences environnementales s’accumulent…

Premier problème :
les émissions de gaz à effet de serre.

À l’aune de nos objectifs de neutralité carbone, une transition alimentaire est impérative.

À votre avis, quelle est la part de l’alimentation dans notre empreinte carbone individuelle ?
22 % !
Mettons les pieds dans le plat, on a plus l’habitude de parler du nombre des calories de nos repas que de leur impact environnemental. Et en France, l’empreinte carbone de notre alimentation s’élève à 2,1 tonnes eqCO2 par an et par personne. Pas génial quand on sait que l’Accord de Paris fixe un objectif de 2 tonnes par personne pour l’ensemble des postes d’émissions !

Ce chiffre vous étonne ? Et ça ne s’arrête pas là ! L’alimentation est le

3ème

secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale, après les transports (30 %) et le logement (23 %).

Mais d’où provient
tout ce carbone au juste ?
Observons ces émissions
d’un peu plus près.

1. L’étape la plus émettrice est (roulement de tambours) : la production de nos aliments !

2 tiers

des émissions de l’alimentation concernent uniquement l’étape de production agricole !

La viande rouge !
Et ce pour plusieurs raisons. D’abord, le régime alimentaire des bovins nécessite de grandes quantités de céréales qu’il faut produire massivement. Ensuite, la fabrication et l’utilisation des engrais azotés employés pour produire ces céréales génèrent du protoxyde d’azote. Pas de quoi rire, puisqu’il s’agit d’un gaz à effet de serre 300 fois plus réchauffant que le CO2 ! Enfin, le méthane émis lors la digestion des ruminants est un GES beaucoup plus puissant que le CO2.
La palme des produits les plus carbonés revient aux produits d’origine animale, et la viande rouge est en tête !

S’ils composent moins de la moitié de notre régime alimentaire, ils représentent 61% de l’empreinte carbone de notre alimentation (viande rouge, viande blanche, produits laitiers, œufs, poissons…).

 

2. Le second facteur qui affole le compteur carbone : le transport de nos aliments.

L’alimentation des ménages français, génère un trafic de

201 milliards de tonnes (d’aliments) par km chaque année.

Nota Bene : il s’agit de l’unité de mesure correspondant au transport d’une tonne sur une distance d’un kilomètre.

Le transport représente

19 %

de l’empreinte carbone de notre alimentation, dont la majorité est générée par transport routier de nos produits (83 % des émissions liées au transport).

3. Un dernier poste d’émissions : la distribution et la restauration, au foyer ou hors domicile.

Si la production agricole et le transport ont des impacts GES importants, la part résidentielle du secteur tertiaire est loin d’être négligeable.

Elle représente

9 %

de l’empreinte carbone totale de l’alimentation.

2ème problème :
la pollution de l’air, de l’eau et des sols.
Manger plus signifie produire plus, mais pour cela, le système agricole moderne a dû se tourner vers les intrants.
Seulement voilà, l’utilisation parfois excessive de ces produits n’est pas sans conséquences …

Les produits phytopharmaceutiques
(les fameux pesticides) protègent les cultures, mais contribuent aussi fortement à la pollution chimique.

Celle-ci représente le

3ème

facteur d’érosion de la biodiversité à l’échelle mondiale.

Et la France n’est pas en reste, puisqu’elle est l’un des plus grands consommateurs en Europe !

Ces fertilisants azotés, en plus des effluents d’élevage, causent près de

94 %

des émissions d’ammoniac.

Ces dernières participent notamment à la formation des fameuses particules fines !

L’arroseur arrosé ?

À vouloir toujours plus, la Terre finira par nous donner moins …

Si les rendements sont globalement stables aujourd’hui, l’usage répété d’intrants agricoles, combiné à d’autres émissions, conduit malgré tout à l’appauvrissement des sols et affaiblit la capacité de certaines cultures à produire des aliments de qualité.

Ce phénomène touche les cultures les plus sensibles, par exemple celle du blé tendre.

3ème problème :
L’abondance dans nos assiettes, on la doit souvent au détriment des écosystèmes naturels : dégradation des espaces pour agrandir des parcelles, biodiversité mise à mal…

Aujourd’hui, l’expansion agricole est responsable de près de

90 %

de la déforestation dans le monde.

En France, l’agriculture occupe

51 %

du territoire, et elle est majoritairement destinée à des productions alimentaires.

À y regarder de plus près cependant, certains types d’aliment sont plus gourmands en espaces que d’autres !

Allons voir du côté de l’empreinte sol.

Sous l’effet conjoint de la politique de remembrement des terres, qui consiste à regrouper les parcelles pour former des champs plus grands et accessibles aux tracteurs, et de la mécanisation de l’agriculture, les haies ont progressivement disparu du paysage agricole.

La perte est estimée à

23 000 km de haies par an.

Pourquoi les préserver ?

À la fois réservoirs de biodiversité et remparts contre l’érosion des sols, les haies enrichissent les sols, ce qui les rend utiles au bon fonctionnement des écosystèmes.

Et concrètement, ça donne quoi ?

  • Certaines méthodes de l’agriculture intensive détériorent la qualité des sols.
  • Les outils agricoles perturbent l’écosystème souterrain, notamment les bactéries et champignons, qui sont pourtant essentiels au bon développement des cultures.
  • Parce qu’elle est manipulée à outrance, la terre s’assèche plus vite et retient moins molins efficacement l’humidité.

À toutes ces problématiques s’ajoute celle
du gaspillage alimentaire.

Attention, la poubelle déborde !

En 2020, le gaspillage alimentaire est estimé à

8,7 millions

de tonnes en France.

Et les ménages sont majoritairement à la source de ce gaspillage, puisqu’ils sont responsables de

46 %

du gaspillage alimentaire total.

Pour ce qui est des emballages plastiques, le bilan n’est pas bien meilleur …

Les Français en jettent chaque année

1,2 millions de tonnes.

On doit se rendre
à l’évidence : nos habitudes alimentaires mettent en danger notre planète … et ont aussi des répercussions sur

notre santé !

Depuis les années 80, la qualité de notre nutrition est en berne… Les gondoles de nos supermarchés affluent de produits ultra-transformés, riches en mauvais gras, en sel et en sucres.

Depuis les années 80, la qualité de notre nutrition est en berne… Les gondoles de nos supermarchés affluent de produits ultra-transformés, riches en mauvais gras, en sel et en sucres.

Vous aussi…

Vous pensez consommer trop de sucre ?

Vous achetez des produits contenant des additifs ?

Vous mangez des plats « tout-faits » ?

Vous n’êtes pas les seuls !

37 % de la population française estime manger trop de sucre au cours de la journée.

Saviez vous que nous ingérons près de 4 kg d’additifs par an et par personne ? Bon appétit !

Depuis 1960, la consommation de plats dits préparés s’accroît de 4,4 % par an et par habitant.

Le constat est alarmant, mais heureusement, il existe des solutions pour bien se nourrir et préserver la planète et notre santé.

Décortiquons ensemble les changements qui peuvent faire évoluer notre assiette, au profit d’un système alimentaire plus durable et plus sain, pour la planète et notre santé.

1. On végétalise nos menus

On sait, les légumes verts de la cantine nous rappellent à tous de mauvais souvenirs… Pour autant, verdir son assiette se présente comme le premier levier d’action pour limiter l’impact environnemental de son alimentation.

Les fruits, légumes, céréales, et légumineuses offrent une panoplie de saveurs et de nutriments essentiels, avec un impact environnemental limité.

Concrètement, à quoi ressemble l’assiette idéale ?

Réduire
Augmenter

Concrètement, à quoi ressemble l’assiette idéale ?

Réduire
Augmenter

2. On adapte nos modes d’approvisionnement
au profit du local.

En favorisant les produits cultivés à proximité, on contribue à réduire le transport des aliments. Et avec le soutien de du développement de filières agricoles locales, on renforce au passage les liens entre consommateurs et agriculteurs.

Produit importé
VS
Produit local
Produit importé
Produit local
VS
Produit importé
1 kg de haricots verts importé par avion émet
22,8

kg éq. CO2 par kg d’ingrédient.

Et pour en savoir davantage, toutes les données sont détaillées ici.

Produit local
Alors que 1 kg de haricots verts produits localement émet seulement
0,7

kg éq. CO2 par kg d’ingrédient !

Ça en fait des émissions de GES pour 1 kg de haricots importés !
Où retrouver la richesse
des producteurs français ?

Le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, en partenariat avec les Chambres d’agriculture, met à disposition en accès libre et gratuit une plateforme pour identifier facilement les producteurs locaux et les points de vente proche de chez nous.

Certaines fermes proposent même de cueillir les fruits et légumes directement sur place. Du champ à l’assiette, il n’y a qu’un pas !

3. On privilégie les produits de saison.

Dans le cas de certains aliments produits localement mais « hors saison », donc sous serre chauffée, la consommation d’énergie et les rejets de GES sont importants.

Et de toute façon, les fruits et légumes de saison sont :

  • adaptés à nos besoins nutritionnels
  • généralement moins chers
  • et bien plus savoureux !

 

En moyenne, une « tomate hors saison » consommée par un français a un impact sur le changement climatique

presque 6 fois

plus important que celui d’une tomate consommée « en saison » !

Produit de saison
VS
Produit cultivé sous serre
Produit de saison
Produit cultivé sous serre
VS
Produit de saison
Radis :
0,6

kg éq. CO2 par kg d’ingrédient

Fraise :
1,1

kg éq. CO2 par kg d’ingrédient

Produit cultivé sous serre
Radis :
8,4

kg éq. CO2 par kg d’ingrédient

Fraise :
3,5

kg éq. CO2 par kg d’ingrédient

Une salade de fruits pas si jolie, jolie.

Au fil des 4 saisons

Pas si facile de s’y retrouver parmi la saisonnalité des fruits et légumes. Heureusement, il est possible de télécharger gratuitement le calendrier des produits de saison.

Pratique pour l’accrocher dans sa cuisine !

4. On choisit autant que possible des produits issus de filières agroécologiques et bio.

Le système agroécologique repose sur une gestion agricole durable, ce qui participe à la transition alimentaire en mettant sur le marché des produits obtenus grâce à des pratiques ayant moins d’impact sur l’environnement (moins d’engrais et de pesticides de synthèse, préservation ou plantation de haies …).

Vous n’êtes pas les seuls !
En privilégiant des agriculteurs aux pratiques vertueuses (sans pesticides, diversification des cultures, élevage à l’herbe, etc.), on choisit un approvisionnement alimentaire à impact réduit sur les écosystèmes. Malheureusement, la part des produits bio dans les courses des Français recule : on enregistre une baisse de 6,4 % en 2021 à 6 % en 2022.

Gage de fiabilité et de conformité, se fier au label Agriculture biologique français et européen est une manière de s’assurer de la bonne qualité des produits.

Faisons le point ensemble !

 

L’agriculture bio en France, ça donne quoi ?
C’est la portion de surfaces agricoles françaises cultivées en bio en 2023.
C’est l’objectif qui devait être atteint d’ici fin 2022, en termes de surface agricole dédiée au bio. Un léger train de retard !
Ce nouvel objectif a été fixé à l’horizon 2027. En avant le bio !

5. On se lance dans le challenge
du zéro gaspi’ et zéro déchet.

Choisir des produits bruts permet de limiter ses déchets alimentaires et d’amoindrir l’impact environnemental lié à la production des emballages ainsi qu’à leur gestion, une fois devenus déchets.

Pas de chichis, pas de gaspi !

L’assiette idéale concerne le choix des aliments, bien sûr, mais aussi sa capacité à produire moins de déchets, qu’il s’agisse d’emballages ou de restes alimentaires.

  • On se constitue des assiettes délicieuses à partir de restes ou on s’essaie à des recettes 0 déchet !
  • On pense aux produits non suremballés, dans un emballage recyclable voire en consigne, et on n’oublie pas le vrac !

D’ailleurs, les produits bios tels que légumes frais, céréales ou noix en vrac sont

4 à 22 %

moins cher que les produits préemballés !

6. On se tourne vers une alimentation constituée de produits aux meilleures valeurs nutritives possibles.

Le Nutri-score,

l’outil qui décortique nos étiquettes !

Le Nutri-Score, vous l’avez forcément remarqué dans les rayons de nos supermarchés : c’est ce petit logo apposé sur les emballages qui note les produits.

Bien pratique pour identifier les produits de meilleure qualité nutritionnelle, il prend en compte 2 facteurs dans son calcul :

  • les nutriments à favoriser (fibres, protéines, fruits, légumes, légumineuses, etc)
  • ceux à limiter (acides gras saturés, sucres, sel).
Comment bien l’utiliser ?

Attention tout de même, il ne prend pas en compte tous les aspects de la qualité nutritionnelle d’un aliment :

  • la teneur en vitamines ou minéraux
  • la qualité des ingrédients
  • la présence éventuelle d’additifs et de pesticides
  • la transformation, voire l’ultra-transformation des produits !

 

Règle d’or : on utilise son bon sens et on regarde la liste des ingrédients. Plus elle est courte, mieux c’est ! En résumé, on se sert du nutri-score pour :

  • comparer les produits d’un même rayon
  • comparer un même produit de différentes marques
  • comparer des produits qui se consomment à la même occasion (que choisir pour mon petit-déjeuner ?)

Finalement…

Le bilan reste mitigé : la consommation d’aliments bio a baissé en 2022, et concernant l’évolution des régimes, la consommation de viande n’a a priori pas diminué, voire légèrement augmenté ces dernières années.

En parallèle, l’usage des pesticides et engrais de synthèse ne diminue pas et les maladies causées en partie par une alimentation déséquilibrée et de mauvaise qualité continuent à progresser !

Pour des raisons climatiques et sanitaires, notre alimentation doit évoluer.

Alors préparons ensemble le menu du futur !

Le top 3

des idées reçues :

Le top 3

des idées reçues :
Manger décarboné coûte plus cher

Pas forcément ! Voici ce qu’on peut faire :

  • Réduire sa consommation de produits carnés, une mesure  d’autant plus efficaces que ces derniers représentent le poste de dépense alimentaire le plus important des ménages (23 %). On achète moins mais mieux : de qualité et chez des fournisseurs labellisés.
  • On privilégie le vrac, surtout quand on achète des produits bio.
Consommer local demande trop de temps et d’effort

Pour réduire la liste de lieux où faire ses courses, plusieurs options :

  • La livraison de paniers de légumes frais par l’AMAP la plus proche.
  • La réception de paniers de fruits et légumes français, comme Bene Bono et Potager city.
  • Un abonnement à une épicerie bio en ligne, comme celles-ci : La Fourche et Kazidomi.
Une alimentation saine et équilibrée manque de saveur

Certainement pas !

  • La technique du « batchcooking » sera votre meilleure alliée pour répartir les différents types d’aliments au fil de vos envies dans votre régime quotidien. Pratique pour rééquilibrer ses apports nutritionnels tout en se libérerant du temps et de l’espace mental pour le reste de la semaine.
  • On part à la recherche de nouvelles recettes !
On pourrait atteindre entre 1/3 et 2/3 de réduction de l’empreinte carbone de l’alimentation des Français d’ici 2050 ! Les scénarios de l’ADEME montrent qu’une transition ambitieuse vers un système alimentaire durable permet de réduire fortement l’empreinte carbone de notre alimentation.
Pour aller plus loin
Le docu à regarder
Le documentaire « Manger nous mènera à l’extinction » produit par Kate Winslet explore les impacts de notre modèle alimentaire sur différents écosystèmes dans le monde.
Le podcast à écouter
Le podcast « Nourrir le vivant » part à la découverte de territoires et populations qui réinventent leur agriculture en nourrissant une réflexion sur notre rapport au vivant.
Les ressources à disposition
La plateforme « Agir pour la transition écologique » propose des formats variés sur l’alimentation (et bien d’autres sujets encore !). Le guide de l’alimentation de l’Ademe conseille et oriente pour vous aider à consommer plus durablement.
Et vous, quelle nouvelle habitude souhaitez-vous adopter ?

Je teste une nouvelle recette végétarienne !

Je limite ma consommation de viande pendant 1 semaine.

Je pars à la rencontre d’un producteur à côté de chez moi …

Une infographie
Qu’est ce-qu’on fait !?
réalisée en partenariat avec :
Voilà, c’est fini !

Texte : Sarah Morinot
Illustrations : Rafaelle Fillastre
Dernière mise à jour : Février 2024

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